Physical Address

304 North Cardinal St.
Dorchester Center, MA 02124

Enrique Vila-Matas : « Avec l’amour, l’écriture est ce qui donne sens à ma vie »

Retrouvez tous les épisodes de la série « Des écrivains parlent travail » ici.
Ouvrir un livre d’Enrique Vila-Matas, c’est s’embarquer dans un voyage vertigineux au cœur des mystères de la création littéraire et en sortir sans autre certitude qu’une sensation de joie pure. Essayiste, romancier et nouvelliste, mêlant à loisir les genres sans distinction, l’écrivain, né à Barcelone en 1948, construit une œuvre débordante d’humour, nourrie d’échos avec celles de Laurence Sterne, Robert Musil, Franz Kafka ou Jorge Luis Borges.
Depuis ses débuts, ses livres dialoguent, surtout, avec leurs lecteurs, les plongeant dans une forme de jeu où s’imbriquent le vrai et le faux, à l’instar d’Abrégé d’histoire de la littérature portative (1985 ; éd. Christian Bourgois, 1990), son premier vrai succès. Ses écrits disent aussi la phobie du silence et du néant (Bartleby et compagnie, Le Mal de Montano, Docteur Pasavento, éd. Christian Bourgois, 2002, 2003 et 2006), et interrogent la frontière fragile entre vie et littérature, comme dans Montevideo, son dernier livre en date (Actes Sud, 2023).
On le rencontre, par visioconférence, installé dans le bureau de son agent à Barcelone, où il vit toujours. Il parle vite, très vite, se lance dans de savoureuses digressions. Entre ses quatre textes en cours et un déjeuner professionnel, il prend toutefois le temps de lever le voile sur sa « salle des machines ».
Je ne me reconnais pas vraiment dans ce texte, contrairement à mon deuxième livre, La Lecture assassine [1977 ; Passage du Nord-Ouest, 2002]. Je l’ai écrit pour ne pas trop perdre mon temps pendant mon service militaire à Melilla [enclave espagnole au nord-est du Maroc], sans penser qu’il allait être édité. J’avais auparavant publié dans la presse espagnole des entretiens totalement inventés avec des célébrités – Marlon Brando, Rudolf Noureev, Patricia Highsmith… C’est par le monde du journalisme que je suis entré dans la fiction.
J’écris depuis toujours. J’ai rédigé mon premier livre à 5 ans : des histoires et des dessins. Ma famille l’a conservé. J’en ai écrit un autre à 14 ans, un roman policier. Si j’ai été ébloui par le cinéma, c’est que j’appartiens à une génération d’Espagnols qui a grandi avec cet art. Le genre qui me plaisait était le « nouveau cinéma » de Philippe Garrel, pas la Nouvelle Vague. Mais les films que je voulais faire étaient impensables dans l’Espagne de l’époque.
Il vous reste 83.36% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.

en_USEnglish